Blog / Thierry Henry: Tout le monde doit être patient avec Gyökeres

Football août 25th, 2025
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Thierry Henry: Tout le monde doit être patient avec Gyökeres

Dans son premier blog Betway Insider, notre ambassadeur mondial évoque le match Arsenal – Manchester United, les deux nouveaux numéros 9 de la Premier League et le transfert de Rashford à Barcelone.

Arsenal débute sa saison contre Manchester United dimanche. Quels souvenirs gardez-vous de vos confrontations avec United en Premier League ?

À mon époque, c’était le match où l’on savait que si on perdait, il allait être difficile de les rattraper. S’ils nous battaient, ils pouvaient briser notre élan et faire dérailler le train. Chelsea était assez compétitive, Liverpool avait aussi une bonne équipe, mais cela se jouait toujours entre nous et United à mon époque. 

On savait que si on ratait contre eux, le championnat était presque perdu, ce qui est assez fou à dire puisqu’il ne s’agissait que d’un seul match. 

Quand je pense à United, je pense aux batailles, oui, mais surtout au respect. Parfois, on les respectait tellement qu’on en faisait trop. C’est étrange à dire, mais on savait que nous devions nous surpasser, comme eux devaient se surpasser pour tenter de nous intimider et de nous battre. Une victoire contre eux, c’était une victoire et c’était la même chose pour eux face à nous. 

Évidemment, ces gars-là ont remporté le titre plus souvent que nous, mais nous savions, et eux aussi savaient, qu’il n’est pas facile d’être au sommet, et qu’il fallait respecter cela.

Ces matchs contre United étaient tellement importants. Est-ce que c’étaient les rencontres que vous cherchiez en premier lorsque le calendrier était publié ? 

Je n’ai jamais été ce genre de joueur. Je gâche toujours ce type de choses, parce que ça m’était égal de jouer United en premier match ou en dernier. Si tu veux gagner le championnat, tu dois être constant. Les deux fois où j’ai gagné la Premier League avec Arsenal, nous n’avons perdu aucun match à l’extérieur. Ce n’était pas seulement une question d’affronter United ou le top 4, il fallait bien jouer chaque week-end. Si tu te concentres uniquement contre United et qu’ensuite tu ne te concentres pas contre Middlesbrough, Charlton ou n’importe qui d’autre alors à quoi bon ? 

La presse en faisait tout un plat. Peu importe ce que disaient Arsène ou Sir Alex, même si c’était banal, la presse amplifiait et cela créait une certaine tension entre les deux entraîneurs, les joueurs, et l’arbitre arrivait avec de la pression.

Mais pour nous, à part la veille d’un déplacement à Old Trafford ou de leur venue chez nous, on n’y pensait pas vraiment avant, car on avait un match en milieu de semaine.

C’était énorme, en toute honnêteté, car c’était souvent le match qui décidait du titre, mais personnellement je n’y pensais pas trop, pas trop tôt. Mais ça restait toujours le spectacle que tout le monde voulait voir, même si parfois c’était plus des batailles que des matchs de football.

United et Arsenal ne se disputent plus le titre aujourd’hui, mais pensez-vous que le match de dimanche aura quand même l’atmosphère d’un grand rendez-vous, puisque c’est le début d’une nouvelle saison ? 

Cela reste toujours un Manchester United – Arsenal. On ne sait pas encore ce qui va se passer cette saison, mais ce n’est plus « le match » de la Premier League depuis bien longtemps. Cela dit, pour les deux équipes, c’est important, peu importe où elles finiront.

Pour United, malgré tout ce qui s’est passé récemment, ils ont quand même réussi à atteindre des finales et à remporter des trophées en cours de route, même s’ils ont eu des difficultés. L’entraîneur voudra voir où en est son équipe face à une bonne équipe comme Arsenal.

Pour Arsenal, la question est : est-ce que ça va être l’année ? C’est la grande interrogation qui va accompagner toute la saison. Elle va être longue, avec la Ligue des champions qui arrive, les joueurs qui vont disputer les qualifications avec leur sélection nationale, mais est-ce que ce sera enfin l’année ? Ils vont perdre des points, ils vont gagner des matchs. Peuvent-ils le faire ? Cela fait longtemps qu’on se pose cette question, mais cette saison, je pense que c’est l’année où quelque chose doit se passer.

Il y a beaucoup d’enjeux dans ce match, et on sait tous que ce n’est que le début, mais si tu ne démarres pas bien, les questions vont tomber immédiatement à cause de ce qui s’est passé récemment.

Quelle équipe ou quel jouer avez-vous le plus hâte de voir évoluer lors de la nouvelle saison de Premier League ? 

Ce n’est pas seulement une équipe. Tout le monde veut voir si Chelsea va continuer sur sa lancée, parce qu’au Mondial des clubs et vers la fin de saison, on avait l’impression que quelque chose se passait. Je ne suis pas supporter de Chelsea, mais je veux voir comment ils vont jouer cette saison.

On veut aussi voir comment vont s’en sortir les recrues de Liverpool. Ils ont gagné le championnat, d’ailleurs. Je répète toujours qu’acheter des joueurs n’assure pas le titre. L’année dernière, ils n’ont quasiment rien acheté, ils ont eu un nouvel entraîneur et tout le monde pensait qu’ils allaient galérer parce qu’ils avaient perdu Klopp… et finalement non. On ne sait jamais, mais on veut voir comment ces gars vont s’adapter.

Évidemment, Arsenal, ça va de soi. Même les fans qui ne suivent pas Arsenal se demandent : pouvez-vous remporter le titre ? C’est la question.

Il y a tellement d’équipes à suivre. Man City : est-ce l’année où on va encore leur donner le titre ? Parce que ce qu’ils font sous Pep depuis si longtemps est hallucinant, mais eux aussi veulent réagir, revenir et gagner à nouveau.

Est-ce que Newcastle va confirmer ce qu’ils ont fait ? Est-ce que Crystal Palace peut continuer sur sa lancée, aller plus haut et essayer de pousser ? Il y a tellement de choses qui vont être vraiment intéressantes cette année.

La Premier League est un championnat extrêmement exigeant, on ne peut jamais savoir ce qui va arriver. Tout le monde pensait que si City connaissait une année compliquée, ce serait l’année d’Arsenal. Eh bien, City a galéré, et c’est Liverpool qui a gagné. On ne peut jamais prévoir.

Il y a déjà tellement de questions qu’on ne cesse de se poser. Aux équipes de nous donner des réponses et de nous montrer de quoi cette saison sera faite.

Arsenal a son nouveau buteur avec Viktor Gyökeres. Quelles qualités avez-vous vues chez lui ? 

C’est toujours un peu injuste, car quand je parle d’un attaquant, cela lui met parfois une pression inutile : dès que je dis quelque chose, ça prend une ampleur démesurée. Ce que je dirais de Gyökeres, c’est que vous avez vu son but contre l’Athletic Club l’autre jour. Cet instinct, cette compréhension du jeu pour anticiper le centre, cette superbe tête avec une touche légère pour guider le ballon de l’autre côté du but, ça, c’est un vrai numéro 9. C’est le but typique d’un 9.

Ce n’est pas un 9 à la Firmino, qui redescend au milieu. Lui veut être dans la surface, entre les poteaux, et il l’a dit lui-même : « Mettez-moi le ballon dans la surface et servez-moi. »

Tu as là un gars qui est un tueur dans la surface – les chiffres ne mentent pas – et tu as une équipe qui se crée beaucoup d’occasions, donc ça devrait être l’association parfaite. Mais il faut aussi comprendre que parfois, ça ne clique pas tout de suite.

Ce qu’on veut, c’est que les gens soient patients avec lui. Et ce qui est agaçant aujourd’hui, c’est que les gens ne sont plus patients. Ils veulent que le joueur performe immédiatement, qu’il marque dès son arrivée et nous fasse gagner tout de suite, ce qui n’arrive pas souvent.

Il a déjà connu l’Angleterre, il ne faut pas l’oublier. Il était à Coventry, il n’a pas réussi à Brighton, donc c’est quelqu’un qui sait ce que c’est de galérer et qui revient plus fort. Il est plus confiant, et ça se voit à son corps, à la manière dont il a pris soin de lui et dont il a changé.

J’aime quand les joueurs me montrent ce qu’ils peuvent faire, et après je peux en parler. En ce moment, les gens préfèrent parler avant la performance.

Je suis fan d’Arsenal, donc évidemment j’espère qu’il va réussir, empiler les buts pour nous et nous guider vers un titre. Mais il ne pourra pas le faire seul. On a vu que les buts, à eux seuls, n’assurent pas un titre. On a vu des gars avec des statistiques folles qui n’ont pourtant rien gagné. L’équipe autour doit être solide.

De ce que j’ai vu de lui et de son achèvement, j’espère vraiment que ça va être une grande réussite et qu’on pourra enfin retrouver ce trophée. Mais comme je l’ai dit, beaucoup d’équipes veulent aussi le soulever.

Que pensez-vous du nouvel attaquant français de Liverpool, Hugo Ekitike, et quel potentiel a-t-il ? 

Hugo a réalisé une saison exceptionnelle avec Reims. Il est sorti de nulle part, c’est un enfant du pays, et il a bouleversé le championnat. Ensuite, il est parti au Paris Saint-Germain, mais c’était l’année de Messi, Neymar et Mbappé. Tu ne vas pas commencer beaucoup de matchs dans ces conditions, donc il a eu du mal.

Il est ensuite parti en Allemagne, et on a vu ce qu’il a fait l’an dernier. Son duo avec Marmoush était létal, ils étaient tous les deux inarrêtables. Quand Marmoush est parti, Ekitike a un peu souffert, mais il s’est remis à marquer ensuite.

Je ne suis pas surpris de ce qu’il a accompli et je suis très content pour lui de le voir revenir sur la bonne voie, car ce n’est pas toujours facile de se relever après la première claque. Il a répondu présent.

Je me souviens qu’on l’avait envisagé pour l’équipe de France Espoirs, mais il ne jouait pas beaucoup à l’époque, donc c’était difficile de le sélectionner.

Aujourd’hui, il joue à Liverpool, il a déjà marqué, et ce qui est bien avec lui, c’est qu’il a les deux qualités : c’est un très bon finisseur dans la surface et il peut aussi jouer en contre car il est rapide. Cela te donne énormément d’options quand tu es entraîneur.

Le voyez-vous comme un numéro 9 à Liverpool, ou bien pensez-vous qu’ils vont le faire évoluer ailleurs dans le trio offensif ? 

Arne Slot décidera de ce qu’il veut faire de lui, mais pour moi c’est un 9. Liverpool a déjà exactement ce qu’il faut sur les ailes. Ils attendaient d’avoir ce joueur-là, ils ont payé cher pour l’obtenir. C’est un 9. Est-ce qu’il peut jouer à gauche ou à droite ? Oui, il est polyvalent parce qu’il a de la vitesse. Mais c’est ce que je veux dire : tu n’allais jamais demander à Alan Shearer de jouer à gauche ou à droite, non ? Donc oui, c’est un 9.

Marcus Rashford a rejoint Barcelone et, comme vous, il portera le numéro 14. Avez-vous ressenti un niveau de pression et d’attentes différents lorsque vous avez signé là-bas ? 

C’est différent, avec l’histoire et les joueurs qui y ont évolué. Encore plus maintenant que l’équipe est revenue là où elle doit être, mais tout le monde le sait. Marcus Rashford n’a pas besoin que je lui dise que jouer pour Barcelone, c’est un autre monde, un autre niveau.

Vous devez toujours gagner et bien jouer, même à l’entraînement. Tout est analysé. Perdre un match équivaut à en perdre dix d’affilée ailleurs. Vous en perdez un ? C’est la catastrophe. Vous ne marquez pas pendant une mi-temps ? Qu’est-ce qui ne va pas avec vous ?

Cela va avec ce club. Il est très difficile de surprendre les gens. Ils ont vu la grandeur encore et encore.

Vous êtes-vous amélioré en tant que joueur à Barcelone ?

C’est une autre façon de voir le jeu, une nouvelle philosophie, et évidemment cela m’a rendu meilleur. Mais une chose est sûre : vous ne pouvez pas vous endormir.

Vous arrivez dans un vestiaire avec Samuel Eto’o à votre gauche, Deco à votre droite. Il y a Thiago Motta, Xavi, Iniesta, Márquez, Touré, Zambrotta, Thuram, et puis vous avez Messi et Ronaldinho. Vous arrivez au centre d’entraînement et la compétition est déjà là sur le parking. Je suis sûr que vous entendez cela souvent, mais le plus difficile, c’était l’entraînement – au milieu de terrain, vous aviez Motta, Márquez et Deco face à Iniesta et Xavi. Même Edmílson jouait au milieu du Brésil.

Voilà comment c’était. Je suis devenu meilleur, mais une chose est sûre : vous ne pouvez pas régresser.

Rashford a traversé une période difficile ces deux dernières années, mais qu’avez-vous vu de lui pendant son prêt à Aston Villa ? 

C’est un peu étrange, parce que parfois il faut analyser si un joueur réalise un bon match ou non, mais cela ne veut pas dire que l’on parle de toute sa carrière. Marcus Rashford n’a jamais eu de problème jusqu’aux deux dernières années environ. Il est arrivé sur la scène et a bouleversé le championnat.

Tout joueur finit par se heurter à un mur à un moment donné, et c’est ce qui lui est arrivé, mais plus tard que pour la plupart. Il doit simplement trouver un moyen de sortir de ce « problème », ce qui est arrivé à tous les footballeurs.

Parfois, vous regardez un match et il ne joue pas bien, et il faut le dire. Mais dans l’ensemble, c’est la première fois de sa carrière qu’il a traversé une période où tout n’allait pas bien.

Pour moi, il y a répondu lorsqu’il est allé à Villa. Là-bas, tout le monde s’est dit : « Ah, voilà le Marcus Rashford que nous connaissons. » Il est sorti de sa zone de confort. Peut-être qu’il était resté trop longtemps à United, et ce n’est pas toujours facile d’être l’enfant du pays.

Il est parti, il a montré ce dont il était capable, et maintenant il est à Barcelone. Je lui souhaite vraiment le meilleur. Quand on est un ancien joueur, au fond, on veut que ces gars-là réussissent, alors j’espère qu’il va profiter de son expérience à Barcelone et retrouver le plaisir de jouer au football.